Parmi les thèmes de recherche abordés dans le cadre de la science de la mise en parallèle ou de la science des priorités, il y a cette question à laquelle les savants ont autrefois cherché des éléments de réponse : laquelle de ces deux situations a plus de mérite et est mieux rétribuée : La richesse vécue avec gratitude ou la pauvreté soufferte avec patiente ? En d’autres termes, lequel est meilleur, un riche qui est toute gratitude ou un pauvre qui est toute patience ?
Les réponses fournies oscillent entre les deux nonobstant, l’opinion qui me parut la plus plausible et à laquelle je conclus après une réflexion menée sur les différents textes et suite à la comparaison établie en eux, c’est que la richesse vécue avec gratitude est préférable ; d’ailleurs, c’est là une situation qui n’est pas aussi évidente qu’on pourrait le croire.
Dieu Dit en effet : »Alors qu’il y a peu de Mes serviteurs qui sont reconnaissants » (S34 V13). Dieu dit, citant les propos de Satan le maudit : « Et, pour la plupart, Tu ne les trouveras guère reconnaissants » (S7, V17).
Le Prophète (saws) demandait à Dieu la richesse et cherchait par la grâce de Dieu de se préserver contre la pauvreté.
Il disait (saws) : « Seigneur Dieu ! Je Te demande la guidance, la piété et la chasteté ; je te demande également de m’épargner le besoin » [1] ; « Seigneur Dieu ! J’implore Ta protection contre la pauvreté, le besoin et l’humiliation et je Te demande de me protéger contre l’injustice ; que je n’en sois ni l’instigateur ni la victime » [2]; « Seigneur Dieu ! Je Te demande Ta protection contre la pauvreté, l’impiété, la turpitude, le désaccord et l’hypocrisie » [3]. « Seigneur Dieu : Je Te demande Ta protection contre la faim, car elle est un mauvais compagnon dans le sommeil » [4].
Il a dit à Sa’d : « Dieu aime le serviteur pieux, riche et discret » [5]. Et à ‘Amar : « Ô ‘Amr ! rien n’égale les biens acquis honnêtement s’ils sont entre les mains d’un homme vertueux ! » [6].
Le hadith : « Les gens de fortune se sont emparés des hauts rangs… » signifie qu’en rendant grâce à Dieu pour les faveurs accordées et notamment, en s’acquittant correctement des devoirs de ces faveurs impliquent, les riches disposent de plus d’occasions que les pauvres pour faire montre d’obéissance. C’est justement cela qu’il a dit dans le hadith : » Telle est la grâce de Dieu qu’Il donne à qui Il veut » [7].
D’ailleurs, faisant l’éloge de certains prophètes honorés, Dieu a retracé la vertu de la gratitude qui les caractérise. C’est notamment le cas de :
- Noé (as), que Dieu a loué en disant : « Celui-ci était vraiment un serviteur fort reconnaissant » (S17 V3);
- Ibrahim, le père des Prophètes et des musulmans : « Il était reconnaissant pour Ses grâces et Dieu l’avait élu et guidé vers le droit chemin » ;
- Dawud et Sulayman, dans : « Ô famille de David, oeuvrez par gratitude, alors qu’il y a eu peu de Mes serviteurs qui sont reconnaissant ». Rapportant les propos que Sulayman a tenus après avoir entendu parler de la fourmi, Il dit : « Permets moi Seigneur, de rendre grâce pour le bienfait dont tu m’as comblé ainsi que mes parents » (S27 V19) ;
- Yusuf dont Il a rapporté les propos suivants : « Ô mon Seigneur, Tu m’as donné du pouvoir et m’as enseigné l’interprétation des rêves » (S12 V101).
Par ailleurs, Il a rappelé Ses faveurs au dernier de Ses prophètes en disant : « Ne t’a-t-il pas trouvé égaré , Alors Il t’a guidé » (S93 V7) ; puis il Lui a dit : « Et quant au bienfait de ton Seigneur, proclame-le » (S93 V11).
Il en a fait de même pour les Compagnons du Prophète (saws) à qui Il dit : « Et rappelez-vous quand vous étiez peu nombreux, opprimés sur terre, craignant de vous faire enlever par des gens. Il vous donna asile, vous renforça de Son secours et vous attribua de bonnes choses afin que vous soyez reconnaissants » (S8 V26).
Cet extrait est issu de l’ouvrage « La science des priorités » de Cheikh Yusuf Al-Qaradawi qui sera étudié lors de notre Séminaire du 25 Mars 2017, « Le sens des priorités ».
Aux éditions Ennour.
[1] Rapporté par Muslim, at-Tirmidhi, Ibn Mâja d’après ibn Mas’ud (Sahih al-jami as-saghir : 1275)
[2] Rapporté par Abu Dawud, an-Nasa’i, Ibn Maja et al-Hakim d’après Abu Hurayra. (Sahih al-jami as-saghir : 1287)
[3] Rapporté par al-Hakim et al-Bayhaqi dans ad-du’a, d’après Anas. (opt. cit. : 1285)
[4] Abu Dawud, an-Nasa’i et Ibn Maja d’après Abu Hurayra (opt. cit. : 1283)
[5] Ahmad et Muslim d’après Sa’d ibn Abu Waqqas (opt. cit. 1882)
[6] Rapporté par Ahmad et authentifié par al-Hakim et Ibn Hibban d’après ‘Amr Ibn al-‘As.
[7] Rapporté par les deux cheikhs d’après Abu Hurayra : al-Bukhari (843) et (6329), Muslim (595)
