Comprendre l'Islam

Les facteurs d’adaptabilité et de flexibilité de la « shari’a »

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Ce chapitre vise à démontrer la flexibilité et la capacité d’adaptation de la législation musulmane « shari’a » pour accompagner l’évolution humaine et le changement d’époque et de lieu, ce qui rend son application valable de tout temps et en tout lieu.

Certains orientalistes et détracteurs de l’islam prétendent que la « shari’a » musulmane et une législation figée, inflexible, incapable de s’adapter aux changements et de répondre aux exigences des nouvelles situations, car elle est fondée sur la révélation, et sa première source de référence sont les textes qui ne peuvent englober tous les contextes mais auxquels le musulman doit obéissance et résignation.

Certes, l’origine de la « shari’a » est divine, mais la conclusion qu’ils déduisent de cette caractéristique est complètement fausse. Il est, en effet, impensable que Dieu, l’Omniscient, le Sage, révèle à Son ultime Messager une législation universelle et permanente qui apporterait aux gens une gêne dans leur religion ou une complication dans leur vie d’ici-bas ou qui serait incapable de faire face aux nouvelles situations qu’elle rencontre.

En effet, Pendant plus de treize siècles, la « shari’a » fut la référence en matière de juridiction et d’élaboration des lois. Elle a contenu les différents environnements, gouverné les différentes ethnies et rencontré plusieurs civilisations sans être incapable de répondre aux exigences du contexte.

Les textes de la « shari’a » n’ont jamais été un frein pour l’évolution de la communauté ou de la civilisation musulmane. Ils sont au contraire des lanternes qui servent de guide et d’orientation ; des sources de motivations poussant vers le chemin du bien et de la réforme ; des causes empêchant le mal et la corruption.

Comment la « shari’a » a pu s’adapter aux différentes situations selon les époques et les environnements ? Par quels moyens est-elle capable de répondre aux exigences de l’évolution et du progrès ? Comment appréhende-t-elle toute nouveauté de manière à garantir les intérêts des gens, à concrétiser les finalités de la législation sans négliger l’exigence du contexte ?

La « shari’a » parvient à tout ceci à travers des facteurs qui la caractérisent et qui lui garantissent une flexibilité lui permettant de l’adapter à tout contexte.

Premier facteur : Le domaine volontairement non-codifié par la « shari’a »

Le premier de ces facteurs est la largesse du domaine libre de toute prescription que la législation a confié aux savants compétents et fiables qui ont atteint le degré de l « ’ijtihad » pour que ces derniers le comble par ce qui permet d’assurer l’intérêt des gens et par ce qui est le plus approprié à leur contexte, en tenant compte des finalités de la législation musulmane, à la lumière de son esprit et des textes catégoriques. Le Prophète (saws) dit : « Dieu a prescrit des devoirs, ne les négligez pas ! Il a fixé des limites, ne les outrepassez pas ! Il a prohibé certaines choses, ne les transgressez pas. Il s’est tu au sujet de certaines choses par miséricorde à votre égard, non par oubli, ne cherchez pas à les connaître » (ad-Daraqotni)

L’expression « ne cherchez pas à les connaître » s’adresse exclusivement aux compagnons pendant l’époque de la révélation afin que leurs recherches et questions ne provoquent pas des difficultés supplémentaires en faisant accroître les prescriptions en matière de devoirs et d’interdictions. C’est pour cette raison qu’il dit dans l’autre hadith : « Tant que je me tais sur une question, ne m’interrogez pas là-dessus » (rapporté par Ahmed, Mouslim et an-Nasa-y)

Ce domaine libre de tout prescription est appelé « le domaine du pardon divin »[1] (mantiqatoul-‘afwi). Cette appellation est tirée du hadith : « Ce que Dieu a autorisé dans Son Livre est déclaré licite et ce qu’Il y a interdit est prohibé. Tout ce à propos de quoi Il s’est tu, veut dire qu’Il l’a pardonné. Acceptez de Dieu Son pardon car Dieu n’est pas de nature à oublier quelque chose » Puis, le Prophète (saws) récita : « Et ton seigneur n’est nullement oublieux » (Marie : 64) » (rapporté par al-Bazzar).

Ainsi, combler ce domaine de pardon divin par des lois et des dispositions, après l’interruption de la révélation (par la mort du Prophète (saws), revient aux « moujtiahids » tant que ceux-ci en ont les compétences requises, par le biais des sources législatives que sont le raisonnement par analogie « qiyas », le choix préférentiel « istihsan », l’intérêt général indéterminé « al-maslaha al-moursala » et l’usage « al-‘urf », exposés dans les ouvrages consacrés à la science des fondements du droit musulman.

Moncef Zenati


[1] – terminologie établie par sheikh al-Qaradawi, reprise depuis par de nombreux savants

2 Comments

  1. Passionnant!Mr Moncef Zenati ,continuez encore longtemps de nous abreuver de vos lumières .Vous avez aussi écrit le sujet sur la démocratie.De temps à autre ,j’y reviens.Mais je trouve le tout un peu succint.Pourriez vous écrire d’autres billets sur le sujet avec des references sur les avis de differents savants et ce qu’en disent les savants salafis nommément ?

  2. Salam alayum

    Excellent rappel, clair, bien écrit et argumenté, toujours un plaisir

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