La « shari’a » comme la définit le dictionnaire « al-qamous » correspond à ce que Dieu a légiféré pour ses serviteurs en matière de religion[1], ou à ce que Dieu a instauré et commandé en matière de la religion à l’instar du jeûne, de la Prière, du Pèlerinage, de la zakat et des autres bonnes œuvres, c’est dans ce sens que Dieu dit : « Puis nous t’avons mis sur la voie de l’Ordre « shari’a » » (al-jathiya : 18).
Le terme « shari’a » est dérivé du verbe « shara’ » dans le sens d’éclaircir et d’exposer clairement.
Au sens littéral, le terme « shari’a » ou « shir’a » désigne aussi le lieu par lequel on parvient à une eau pure, ininterrompue, dont le buveur n’a pas besoin d’instrument pour la puiser.
La racine « sha-ra-a » et ses dérivés ont été citées dans le Coran à cinq reprises. Elle a été citée sous la forme de verbe conjugué au passé dans le verset : « Il vous a légiféré « shara’a » en matière de religion, ce qu’Il avait enjoint à Noé, ce que Nous t’avons révélé, ainsi que ce que Nous avons enjoins à Abraham, à Moïse et à Jésus : Etablissez la religion ; et n’en faites pas un sujet de division » (la consultation : 13)
Ce que Dieu a légiféré ici concerne les fondements et non pas les ramifications ; les dogmes et non pas la pratique, communs à tous les messages divins du temps de Noé à celui de Mohammad (saws).
Dans la même sourate, la racine « sha-ra-a » fut citée pour blâmer les idolâtres pour s’être permis de légiférer en matière de religion ce que Dieu n’a pas permis. Dieu dit : « Ou bien auraient-ils des associés (à Dieu) qui auraient établi pour eux des lois religieuses que Dieu n’a jamais permises » (la consultation : 21)
Tout ceci concerne le Coran mecquois.
Quant au Coran médinois, Dieu dit dans la sourate « la table servie » : « A chacun d’entre vous Nous avons assigné une législation « shir’a » et un plan à suivre » (la table servie : 48)
Au sens littéral, le terme « shari’a » correspond également à la « voie » (tariqa). C’est dans ce sens que Dieu dit : « Puis, Nous t’avons mis sur la voie « shari’a » de l’Ordre, suis-la donc et ne suis pas les passions de ceux qui ne savent pas » (al-jathiya : 18).
On peut remarquer que le terme « shari’a » n’a été évoqué sous cette forme qu’à cette endroit du Coran bien que la sourate « al-jathiya » soit mecquoise, c’est-à-dire avant la révélation des prescriptions juridiques et de tout ce qui s’y rattache qui ne furent révélées qu’à Médine.
Domaine d’application de la « shari’a » :
Le Coran contient des prescriptions juridiques relatives à tous les aspects de la vie dont:
Des prescriptions qui concernent le culte « al-‘ibadat »
Des prescriptions relatives au droit de la famille.
Des prescriptions relatives aux différents échanges commerciaux.
Des prescriptions relevant du code pénal.
Des prescriptions relatives au domaine de la politique et des relations internationales.
Entre la « shari’a » et la « fiqh » :
La « shari’a » correspond à l’ensemble des lois que Dieu a prescrit à ses serviteurs à travers le Coran et la Sunna, et à travers ce qui en découle comme le consensus « ijma’ », le raisonnement par analogie « qiyas » et les autres sources du droit musulman. Dans ce sens, la shari’a correspond à la « Loi divine ».
Quant au « fiqh » – le droit musulman – il correspond à la science qui a pour objet la déduction des prescriptions juridiques pratiques à partir de leurs sources de références.
Le droit musulman est donc déduit d’une manière rationnelle en ayant recours à l’effort de réflexion personnel.
Ainsi, la « shari’a » est la finalité, alors que le droit musulman constitue le moyen pour y parvenir.
On désigne également par le « fiqh », l’ensemble des prescriptions juridiques pratiques déduite à partir de leurs sources de références.
Il importe de préciser que les lois de la « shari’a » sont divisées en deux catégories :
1- Une catégorie de lois tirée directement du Coran et de la Sunna, à partir de textes dont la signification est catégorique. Ce type de lois est le moins nombreux bien qu’il soit le plus important étant donné que ces lois constituent les fondements de la « shari’a ».
2- Une autre catégorie de lois déduites par la réflexion des jurisconsultes à partir des textes du Coran et de la Sunna (dont la signification n’est pas catégorique), ou dans le cas d’absence de textes et ce, au moyen du raisonnement par analogie, de l’intérêt général indéterminé, de la présomption de continuité, du choix préférentiel, de la considération de l’usage …
Ce type de lois est le plus nombreux et constitue le domaine d’application du droit musulman.
La relation entre la shari’a et le fiqh a suscité une confusion chez certains intellectuels au point de considérer que les deux sont complètement distincts, la shari’a étant divine alors que le fiqh est positif !
Or ceci n’est pas vrai, car le droit musulman « fiqh » est certainement une science religieuse étant donné qu’il est du nombre des sciences basée sur la révélation divine.
Par ailleurs, la réflexion en vue de la déduction des prescriptions n’est pas libre de toute règle. Au contraire, cette réflexion est délimitée par les fondements juridiques de l’argumentation.
De plus, la shari’a ne peut exister d’une manière indépendante, elle existe au sein de l’ensemble constitué par le droit musulman, sauf en ce qui concerne les cas nouveaux qui se produisent. Dans ce cas la loi de la shari’a correspond à la déduction des jurisconsultes contemporains à la lumière des fondements de la législation « shari’a » et de ses finalités. Puis, cette loi sera ajoutée au patrimoine du droit musulman « fiqh ».
Par conséquent, l’idée qui consiste a réfuter le droit musulman sous prétexte qu’il s’agit d’une réflexion humaine qui n’est pas infaillible est totalement inacceptable, car ceci conduira à la réfutation de la shari’a.
En revanche, ce qui est acceptable, c’est apporter au droit musulman quelques réformes dont certaines relèvent de la forme comme la classification, la théorisation ou la codification, et d’autres relevant du contenu dont la plus importante est la revivification de l’ijtihad, qu’il s’agisse de l’ijtihad sélectif, en accordant la prévalence à un avis appartenant au patrimoine du fiqh, ou de l’ijtihad constructif en se prononçant sur un cas nouveau à la lumière des textes catégoriques et des finalités de la législation, sans chauvinisme pour un avis ancien ni asservissement à une idée nouvelle.
Moncef Zenati (d’après « Introduction à l’étude de la législation musulmane » (madkhal lidirsat ash-shari’a al-islamiyya)
[1] – Le terme religion est au sens large englobant tous les aspectes de la vie
2 Comments
Salam,
Les portes sont ouvertes à ceux qui savent les pousser.
salam alaykoum
qu’Allah ta’ala vous récompense pour vos efforts bénéfiques.
Cependant je trouve dommage que vous n’invitez pas les musulmans à adherer à l’une des 4 écoles juridiques comme le font la presque totalité des universités islamiques (al Azhar, al zaytouna…sauf médine).
De plus, les savants appartiennent dans leurs grandes majorités à ces ecoles (ex: souyouti et ibn rushd sont malikites, al ghazali fut shafiite…). Si malgré leurs grandes sciences, ils sont dans une ecoles juridiques, comment à notre niveau pouvoir en sortir?
cela a toujours été enseigné dans quasi toutes les madrassa et universités islamiques.
en tout cas, bonne continuation
salam alaykoum