Actualités

Interview de Moncef Zenati

Pinterest LinkedIn Tumblr

Moncef zenati

Safya Dabda : Moncef Zenati, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs afin que nous puissions vous connaitre davantage ?

Moncef Zenati : J’ai grandi en Tunisie, bien que je sois né en France. J’ai tout d’abord suivi un cursus scientifique, en commençant par un baccalauréat scientifique suivi d’une licence en mathématiques. Puis je me suis réorienté vers des études en sciences islamiques à l’IESH de Château-Chinon, où j’ai obtenu une maîtrise. Actuellement, je suis enseignant en droit musulman et également responsable des études à distances en sciences islamiques, à l’IESH.

S.D : Vous animez un site web appelé Havre de savoir. Pouvez-vous nous en dire plus ?

M.Z : Avant d’être un site Internet, Havre de savoir est avant tout une association, où il est fixé comme objectif de présenter l’islam et ses valeurs, à travers une compréhension authentique et de juste milieu. Nous voulons présenter à la société le vrai visage de l’islam, le vrai visage du Prophète Mohamed (pbls). Nous pensons que la compréhension est ce qui est le plus important.

S.D : Internet est-il pour vous un outil efficace pour informer le public sur l’islam ?

M.Z : Effectivement, internet véhicule énormément d’information, et il devient une voie de diffusion importante pour la religion. Parmi les nombreuses activités de Havre de Savoir, nous avons voulu créer ce site pour que les internautes épanchent leur soif de savoir, surtout lorsque nous avons remarqué que beaucoup de jeunes se réfèrent facilement au Web où tout et n’importe quoi sont exposés. Nous voulons que ce site soit une référence fiable de l’islam.

S.D : Le Prophète (Pbsl) a dit : « Méfiez vous des choses inventées car toute chose inventée est une innovation, et toute innovation est une aberration ». Que pouvez-vous nous dire là-dessus ?

Nous devons faire très attention à l’interprétation de ce type de parole car, lorsque nous traduisons ce propos prophétique, nous pouvons comprendre autre chose que ce qu’il a voulu dire. En effet, l’innovation dont il s’agit ne fait pas référence à toute innovation. Ici, l’innovation à réfuter (bid’a) est celle qui est introduite dans le domaine exclusif de la religion aux plans cultuel et dogmatique. Et tout ce qui est en dehors de ces domaines n’est pas concerné.

S.D : Beaucoup pensent que la musique, la photographie et les dessins sont illicites. Quel est votre point de vue ?

M.Z : Au contraire, l’islam a toujours encouragé l’art. Il suffit de regarder l’histoire. On ne peut pas comprendre l’islam en abstraction de toute son histoire. La musique a toujours été présente dans le monde musulman, notamment en Andalousie ou à Bagdad. D’autant plus qu’il n’y a aucun texte explicite et authentique qui interdit la musique. Cette dernière n’est pas un problème en soi, elle n’est pas illicite. Cependant, tout dépend de ce qui est mis dans cette musique et dans son interprétation. Les paroles ne doivent pas appeler à la débauche, à la violence, au non respect de l’autre, des insultes, etc. Si la musique respecte toutes ces conditions, il n’y a rien qui l’interdit.

Quant à la photographie et les images, il y a là également une mauvaise compréhension du propos du Prophète qui parle des « dessinateurs », le problème étant ici celui de la traduction du terme arabe mouçawwiroune. Parfois, nous traduisons des termes, mais la traduction ne correspond pas au sens originel du mot. Par exemple, le mot çoûrah désigne en arabe tout ce qui a une forme, autrement dit les statues. Al mouçawwir n’est donc pas le dessinateur, c’est celui qui donne forme. Lorsque le Prophète dit que : « les anges n’entrent pas dans les maisons dans lesquelles il y a uneçoûrah » Il évoque bien les statues et non pas les dessins sur les surfaces planes. Et en ce qui concerne les photographies, il ne s’agit catégoriquement pas de cela ici, tout simplement parce qu’à cette époque la photographie n’existait pas. Le Prophète ne pouvait pas interdire quelque chose qui n’existait pas, même si par convention, aujourd’hui, nous appelons une photographie çoûrah en langue arabe. Une des règles pour la compréhension de la tradition prophétique, que j’expose dans mon livre La Sunna : mode d’emploi, est qu’il faut s’assurer de la bonne signification des mots, comme ils étaient employés au moment de la Révélation.

S.D : Quels conseils auriez-vous à donner à nos lecteurs qui souhaiteraient s’investir dans la diffusion d’informations sur l’islam ?

M.Z : Pour cela il est important de s’instruire. On ne peut pas défendre ou prêcher une chose que nous ignorons. Donc il faut tout d’abord s’instruire, se former, pour comprendre sa religion de la manière la plus adéquate, en se référant aux sources les plus attestées. Avec en plus une éthique du dialogue comme il doit seoir au musulman.

S.D : David LODGE a dit: « Les médias représentent la plus grande puissance de notre société contemporaine », qu’en pensez-vous ?

M.Z : Effectivement, les médias sont une véritable puissance. Ils ont le pouvoir d’orienter les conceptions et la pensée des gens. C’est un outil qui a été totalement négligé par les musulmans pour défendre la religion musulmane de toutes sortes d’allégations farfelues, tout comme l’image du Prophète. Il faudrait cependant que les musulmans se dotent de médias dignes de ce nom pour véhiculer leur message de manière efficace. Notre initiative va dans ce sens.

Safya Dabda

Source : La plume de l’Est

Écrire un commentaire