A une génération incomprise.
Je suis celle que l’on peut nommer : première génération, d’enfants d’immigrés dignes et braves.
Dans un néant spirituel je naquis. Entre le foyer, où la religion se résumait à une somme d’interdits, et le monde extérieur, dans lequel j’ai été projetée, je n’ai pas trouvé la force de résister.
J’ai cru aux fausses promesses, ainsi qu’aux laideurs maquillées. J’ai plongé, j’ai chuté ; j’ai coupé le cordon car follement éprise de liberté.
Au bord du gouffre, je me suis laissée porter par la tempête. Mes rages, mes colères et mes frustrations, coulent dans mon sang couleur cramoisi. Que faire de ce qu’on a fait de moi ? Je pêche et pourtant Dieu sait comme j’y crois.
Je ne sais que trop peu, ce que c’est que d’avoir peur de l’interdit. Mais je connais l’élan du cœur. Je sais donner en silence, et me lever au milieu de la nuit, pour aider mon frère. J’ai mal de tout mon être face à l’injustice et c’est passionnément, que je défends mes opinions.
Ici, là, j’ai comme une nostalgie : du bien, du bon, du juste. Les hommes sont méchants ; quant à moi, j’ai tout simplement les crocs. Enfant de pauvre, la hargne est souvent mon moteur.
Je suis somme d’incohérences et de contradictions. Je m’attache à certaines pratiques, souvent pour les mauvaises raisons. Mais qui peut dire, qu’Il n’aura pas pitié de moi? Parfois je me fais mal au cœur, or ce cœur ne peut contenir plus de miséricorde, que Celui qui en est la source-même.
A vrai dire, je pourrais bien mourir d’authenticité. Entre pudeur excessive et communication laborieuse, c’est souvent, que les mots me manquent.
Perdue, déboussolée, j’ai erré sur le globe. Cherchant le nord avec si peu d’équilibre, les yeux mi-clos.
Et puis…comme le Mont Uhud*, mon cœur a tremblé. Toi que je tenais à distance, tu m’as un jour foudroyé. C’est de là-dedans, que la lumière a jailli.
Quelle est cette religion, qui fait du savant dévot, un homme qui craint le poids de ses pêchés ? Et du pêcheur rebelle, un homme qui jamais, ne désespère de la miséricorde Divine ?
Alors c’est larme après larme, que je tente de m’éloigner de la terre des ingrats. Pieds nus et tête baissée ; sur Ta terre et sous Ton ciel, je marche guidée par Ton amour, Ton infinie tendresse envers les hommes. Je n’aurais su m’aimer autant. J’aurais sans hésitation condamné mon semblable mais Toi…Seigneur, fais de moi un serviteur reconnaissant.
Enfin je comprends l’origine de cette nostalgie, de cette aigreur vis-à-vis de la vie et des hommes. Comment ne pas souffrir de leurs imperfections ? Quand l’on vit dans le souvenir inconscient du Parfait ? N’aie crainte, O pauvre petite âme ! L’humus t’attend.
Et à toi, qui à l’instar de l’étoile à l’extrémité de l’univers, brille si puissamment du fond des âges. Toi le noble, toi le souriant, que je souffre que nos siècles soient si éloignés. Il faut manquer de noblesse, pour manquer ta lumière.
Aujourd’hui comme je suis fière, moi, première génération, d’enfants d’immigrés dignes et braves, de faire partie de la communauté de Mouhammad*.
Voilà l’hégire des enfants d’immigrés, an 1435, France.
Hynd Habach
Association « Des Françaises Voilées S’expriment »: desfrancaisesvoilees.fr
*Le Mont Uhud est une montagne d’Arabie Saoudite, qui trembla sous le poids symbolique et réel, du prophète de l’islam et de ses proches compagnons.
*Paix et bénédictions de Dieu sur lui
2 Comments
Havre de savoir donne beaucoup la parole aux musulmans étant enfants d’immigré(comprendre arabes ou berbères), ont-ils plus de valeur et d’importance que les autres musulmans?
Je ne crois pas que ce soit la volonté de Havre de savoir.
Je suis persuadée que si un aveyronnais musulman, venait à témoigner sur son Aveyron natal et son cheminement vers l’islam, Havre de S serait ravi de le publier ici.
J’espère d’ailleurs de tout cœur lire ce genre de témoignage à l’avenir. 🙂